Carnets ouverts 3/
Au fil de la Seine
Je m'arrête sur ce banc apparemment quelconque. J'ai appris très tôt qu'il était en fait un billet pour le voyage.
Au milieu de l'obscurité, du bord de cette eau qui s'endort aux reflets d'un bleu inoui, je pense comme rarement. L'ivresse de la pensée fait effet en toute sobriété. Je me laisse aller. J'ai tant de choses dans la tête. Si les autres savaient....
Dans cette ville que j'aime par dessus tout, avec ses souffrances et ses plaies refermées, j'ai le coeur bien serré aussi. Mais mon destin est là à l'évidence. Sans doute flotte t'il comme les bateaux longs qui sont devant mes yeux. Il suffirait d'une volonté pour les voir partir. Qu'attendent-il si ce n'est le jour qui arrivera de l'autre côté....
Ce soir, tout est magnifique, même le plus insensé des bâtiments rénovés ou en voie de l'être. Je plane en regardant parmi les nuages éclairés ce soleil qui bientôt illuminera New-York.
Dans un port, fut-il Rouen, on a envie de partir, de rêver. Larguer les amarres. Comme c'est étrange, je n'entends aucun bruit. Tout n'est que plénituide dans ce paysage que je savais pourtant d'une quotidienneté sans surprise.
Mon Dieu, que la vie est si douce ! Ce soir, j'ai envie de reprendre goût à la vie. Il y avait sans doute des gens qui m'avaient aimé ici et là. Je les aimais à mon tour énormément. Le ciel, l'eau, ce silence, tout me semblait immense.
Texte non définitif et susceptible d'être modifié. Le narrateur n'est pas l'auteur.
Marbre : Nicolas Coustou, la Seine et la Marne, musée du Louvre.