Méditation poétique

"Il n'y a d'homme plus complet que celui qui a beaucoup voyagé,
qui a changé vingt fois la forme de sa pensée et de sa vie".

Alphonse de Lamartine

Comments

[Martin-Lothar]

Bravo ! Al fonçons dans la Martine, qu'elle le veuille ou pas (Mais à mon avis, elle ne demande que ça !)
A+

[Jean-Pierre]

Changer la forme de sa pensée et de sa vie, c'est se remettre en cause, c'est peut-être même tout simplement penser... :-)

Céline, lui, est toujours le même, (normal, il est mort). Dans toute son œuvre, on retrouve cette misanthropie de talent...

[Sessyl]

J'ajoute la citation de Céline à mon florilège perso, merci !

Quant à changer "vingt fois la forme de sa pensée et de sa vie", c'est quand même beaucoup : tous les moins de 3 ans, donc, à partir de l'âge adulte ? exagération littéraire, sans doute. De + qd on change d'avis et de façon de vivre, c'est + souvent collectivement qu'individuellement. car il existe des "modes intellectuelles" ou idéologiques (= idéologies molles, implicites) presque irrésistibles. Cela me semble encore plus vrai à notre époque d'hyper-médiatisation des genres de vie, et aussi de la marchandisation desdits modes de vie. On est des caméléons, même sans s'en rendre compte. La pub joue son rôle.

L'influence des événements intervient aussi beaucoup dans nos retournements individuels et collectifs, plus peut-être que notre évolution intellectuelle réfléchie. Ainsi beaucoup de Français en août 1914 ont eu une attitude extrêment patriote, y compris les socialistes et les syndicalistes (l'Union sacrée), lesquels proclamaient pourtant juste qqes semaines avant leur antimilitarisme.
Il est vrai que l'on croyait que la guerre serait courte. Beaucoup de pacifisme, en revanche, et parfois viscéral à partir de 1919, au point de tolérer plus tard les agressions hitlériennes. Il est vrai que les atrocités de la guerre de tranchée étaient passées par là.
2e et dernier ex : quand j'étais étudiante, se dire anticommuniste était quasiment la certitude d'être classé à l'extrême-droite, même si on avançait des arguments mesurés et historiquement solides (ravages humains du stalinisme et de ses ersatz, par exemple) ; mais actuellement, se déclarer communiste, en France en tout cas, est bien courageux : on passe au mieux pour terriblement ringard, passéiste et obtus ; au pire pour...fasciste.

Je crois à la liberté de pensée, à l'autonomie des comportements. Mais je crains que, dans la réalité, ils existent et s'expriment rarement.

[Monsieur Julien]

En fait, ce n'est pas sur le côté voyage que la citation m'a plu mais sur le fait que "l'homme complet" est celui "qui a changé vingt fois la forme de sa pensée". Je trouve ce morceau de phrase particulièrement intéressant. J'aimerai bien savoir à quoi correspond ou ressemble un homme qui change vingt fois son fusil d'épaule. Ce doit être étrange pour faire que les autres vous suivent.

Sur les voyages, je vous apporte la citation de Céline que j'ai trouvé dans une de mes lectures de l'été ("Et toi mon coeur pourquoi bats-tu" un florilège de beaux textes rassemblés par d'Ormesson):

"Les voyages. Un petit vertige pour couillons."

Un peu rude mais marrante, non?

Pas très gentil pour les couillons comme moi, mais bon...

[Sessyl]

Voyager ? très bien. Encore que maintenant cela devienne presque une obligation ; sinon on est considéré comme "bizarre" - je veux dire si l'on a les moyens financiers de voyager, et qu'on préfère consacrer son temps et son budget à autre chose.

Le voyage, c'est tout de même aussi (surtout ?) une industrie qui exige des clients, contrairement à ce qui se passait à l'époque de Lamartine.

Sur les centaines de milliers de cars remplis de personnes du 3e voire 4e âge provenant des pays développés, et visitant les hauts lieux touristiques...je préfère ne rien dire. D'ailleurs parmi eux ma petite maman de 86 ans. Quand même à ce sujet, qqes réflexions peu consensuelles m'effleurent fréquemment, avouons-le.

Citons Vialatte (je crois que c'est lui) qui osait dire que le tourisme "çà consiste à mettre des gens qui seraient mieux chez eux chez des gens qui seraient mieux sans eux"

Personnellement, on l'aura compris, je change aussi facilement, (voire plus facilement) ma pensée et ma vie en restant sur place qu'en bougeant. Et je proclame (assez isolée, je dois dire) : "Vive le voyage immobile !", vive le voyage par l'imagination, la littérature (notamment en langue étrangère), le cinéma, la musique écoutée et pratiquée, voire la simple connaissance en profondeur d'une "cité" tout près de chez soi, certes aucunement touristique, mais si intéressante humainement.

Je ne prêche aucunement. Chacun son truc.