Monsieur Julien au bar du Lutetia

Boulevard Raspail, dans le 6ème arrondissement de Paris, se trouve l'hôtel Lutetia : il fut le premier hôtel art déco construit à Paris en 1910, à l'initiative du Bon Marché, le grand magasin situé pas loin. Il est le seul palace de la rive gauche.
Actuellement propriété de la famille Taittinger(Champagne pour tout le monde !), il est aujourd'hui l'un des rares témoignages de ce style si particulier dans la capitale.

Pendant l'Entre-deux-guerres, le Lutetia devient la résidence de personnalités et artistes du Saint-Germain-des-Prés des Années Folles : Matisse, Gide, Saint-Exupéry, Joséphine Baker, Jean Renoir, Albert Cohen qui y rédigea Belle du Seigneur.....Le Saint-Cyrien de Gaulle y aurait même emmené Yvonne pour sa nuit de noces....

En 1940, l'hôtel est réquisitionné par l'armée allemande pour y installer ses services du renseignement et de contre-espionnage. Les bottes claquent pendant 4 ans. Le bosch s'encanaille.

A la Libération, Charles devient le Général et réquisitionne le lieu pour accueillir les survivants des camps de concentration : les rescapés envahissent les salons et contemplent verrières, fresques et escaliers monumentaux.

Après les camps, le luxe.

Aujourd'hui, le ministère de la Culture cherche à classer cet hôtel au titre des monuments historiques. Chacun l'aura compris : ce lieu, si riche de sens et d'histoire, le mérite bien.

Allez, je vais prendre un drink....

Bar de l'hôtel du Lutetia

Comments

[Pagine]

Pendant 8 ans, j'ai travaillé juste en face du Lutétia, dans cette impasse rendue célèbre par le théâtre Récamier de Madeleine Renaud et Jean-Louis Barrault.
Le Lutétia était resté pour moi le symbole de l'horreur nazie, et je n'y ai jamais mis les pieds...
Puis, en 85, j'ai lu La Douleur, de Marguerite Duras où, dès la première page, on peut lire: "Il pourrait également téléphoner dès son arrivée dans un centre de transit: "je suis revenu, je suis à l'hôtel Lutétia pour les formalités"...".
C'est ainsi que j'ai appris comment la France s'était réapproprié le Lutétia. Cette seconde "vocation" m'a laissée une impression d'horreur et ne m'a pas davantage incitée à y aller voir. Trop lourd.
Curieusement, je viens juste de lire les "Cahiers de la guerre" de Marguerite Duras, où sont consignés ces moments d'attente épouvantable du retour ou du non-retour des déportés.
Oui,Monsieur Julien, il faut classer ce lieu. Mais sans doute est-il difficile pour beaucoup de l'évoquer. Quant à y aller n'en parlons pas!
Merci pour le drink que vous ne m'avez pas offert: je l'aurais refusé.
Cela me fait penser au Café Houdard à Rouen, à la façade duquel, les lettres gothiques s'accrochèrent pendant l'occupation...